«Dieu a maudit celui qui se nourrit d’usure, celui qui l’offre, celui qui en témoigne et celui qui en établit le contrat».
Hadith (Les auteurs de Sounanes)

Les systèmes financiers actuels, en raison du règne des taux d’intérêt, ne sont pas islamiques. Toutefois, les économistes musulmans, en s’y fondant, ont imaginé un système financier islamique obéissant à la loi de l’interdiction de l’intérêt.

Les Systèmes financiers actuels
Un système financier est une organisation financière d’ensemble dont le but est de permettre, de faciliter, de promouvoir les opérations financières entre agents. Ces opérations sont à la base de l’activité économique d’un pays quelconque. Une opération financière particulière et importante, l’opération de prêt-emprunt, est une opération à travers laquelle des agents économiques: «a besoin de financement» (les entreprises par exemple) contractent avec des agents économiques à «capacité de financement» («ménages» par exemple) qui eux, sont capables d’en fournir.
Le financement d’un agent par un autre se réalise à l’heure actuelle de deux manières directement et indirectement. Directement dans le cas de la «finance directe» et indirectement dans le cas de la «finance indirecte».
La finance indirecte signifie la présence, en tant qu’intermédiaire, de la banque et, par extension, du système bancaire lequel reçoit des dépôts qu’il peut prêter en partie au moins.
La finance directe signifie un contact, sans intermédiaire, entre préteur et emprunteur, sur le marché financier et plus particulièrement, sur le marché primaire de ce marché financier (qui compte aussi un marché secondaire).
Par ailleurs, nous pouvons faire état d’un marché monétaire qui peut être essentiellement un marché interbancaire où l’opération de prêt-emprunt s’effectue uniquement entre banques.
Ainsi, le système financier existant fonctionne à l’aide de trois institutions l’institution bancaire, le marché financier et le marché monétaire.
De nos jours, les systèmes financiers nationaux, de même que le système financier mondial, sont modelés par les taux d’intérêt.
Que ce soit pour un emprunt auprès d’une banque ou sur le marché financier sous forme d’obligations par exemple, les taux d’intérêt s’appliquent. Les quelques rares banques islamiques constituent une exception à cette règle.

Le Système Financier Islamique
L’originalité du système financier islamique réside dans son rejet de cette véritable institution qu’est le taux d’intérêt.
Dès lors, au lieu de reposer sur le taux d’intérêt et le risque unilatéral, il devra se bâtir, dans le respect de la Sharia, sur le principe du mudarabah, à savoir le principe de partage des profits et de risque mutuel.
Une description du système financier islamique, à travers son système bancaire, son marché financier et son marché monétaire, existe dans l’oeuvre d’économistes musulmans, de façon assez détaillée. Pour ne pas lasser le lecteur par trop de détails techniques, voici une présentation succincte de ce système.

Le Système Bancaire
Deux modèles peuvent être évoqués

– Le premier est essentiellement basé sur la notion de partage des profits. Il imagine des déposants contractant avec une banque en vue de partager les profits issus de l’activité de cette dernière. La banque, en effet, pourra contracter avec un agent-entrepreneur recherchant des fonds à investir, à placer, et s’accordera avec lui pour qu’il partage ses profits selon un pourcentage fixé dans le contrat. Les gains ainsi récupérés par la banque sont fondus en une masse destinée à être partagée entre les déposants-actionnaires de la banque en fonction des termes de leur contrat. Les profits obtenus par l’ensemble des déposants représentent donc un certain pourcentage de la totalité des profits de la banque.
D’après ce premier modèle, les banques ont la possibilité de prêter sans intérêt proprement dit, mais ces prêts ne doivent provenir de ponctions effectuées sur les dépôts en comptes courants : l’argent déposé en vue d’une «opération de profit» ne doit pas servir à ces opérations de prêt sans intérêt.
– Dans le deuxième modèle, une partie des dépôts sert aux prêts sans intérêt et l’autre partie est consacrée aux activités risquées, celles aboutissant à un partage des profits, à la façon du premier modèle. Les dépôts en comptes courants ne doivent pas servir à ces prêts sans intérêt «ils doivent rester intacts».
Le deuxième modèle correspond parfaitement à la façon des premiers musulmans de voir l’activité bancaire. En ces temps reculés, l’agent-banquier avait pour rôle de faciliter les opérations d’échange (d’où les prêts sans intérêt) et de s’adonner aux activités de placement (dans le cadre du système de partage des profits).

Le Marché Financier
Sur le marché primaire du marché financier islamique, diverses institutions, dont les banques et les «ménages», achètent des titres (actions par exemple). D’où la possibilité pour les entreprises de lever les fonds nécessaires à leur projet dans le cadre d’une deuxième source de financement. Ce marché devrait assurer une allocation des fonds basée sur la comparaison des anticipations de profits des différents projets d’entreprise. Cette comparaison se fait grâce à l’accumulation et à la diffusion par le marché financier, de l’information relative aux entreprises. Il en résulterait une amélioration de la répartition, de l’allocation des fonds car du fait de la sélection, ceux-ci alimenteront les projets les plus rentables. Ce qui est mis en valeur ici, c’est l’efficacité hors pair d’un système d’allocation des ressources fondé tout d’abord sur la rentabilité des placecements effectués dans le secteur réel de l’économie.
Le développement du marché primaire exige cependant le développement simultané d’un marché secondaire.
Ce dernier permet en effet de satisfaire la préférence pour la liquidité des épargnants détenteurs de titres financiers, en leur présentant la possibilité de les vendre rapidement. D’où le placement pour le long terme, d’une masse plus importante d’épargne.
Cependant, les placements ne sont pas sans risques : risque de faillite de l’entreprise et risque lié à la capacité de l’entreprise d’engendrer des profits.

Le Marché Monétaire
Une des activités principales du marché monétaire islamique est la canalisation des surplus de fonds d’une institution financière vers le projet de placement ) et de partage des profits) d’une autre. Car cette dernière manque de fonds pour y faire face ou car elle estime l’engagement financier trop important et préfère en conséquence le partage des risques. En outre, l’intervention de la banque centrale peut ici se révéler nécessaire, en particulier dans les périodes où les occasions de placement )sur la base du partage des profits), ne trouvant pas de possibilités de financement par les banques elles-mêmes, requièrent un prêteur ultime.

Le système financier islamique ici esquissé peut être approfondi sur plusieurs points
– les risques de perte en capital (issus des achats et des ventes de titres financiers) et les moyens de diminuer ces risques.
– les détentions stériles d’argent dans les comptes courants ou en monnaie et les moyens de les rendre quantitativement les plus faibles possibles.
– la nécessité ou non pour chacun des «modèles bancaires» de détenir des réserves sur les dépôts en comptes courants pour ce qui est du premier modèle et les dépôts pour prêts concernant le second.

Au bout du compte, il n’est pas irréaliste d’attendre du système financier islamique qu’il favorise l’instauration d’une meilleure allocation des ressources et d’une économie compétitive, d’une plus grande stabilité financière et économique, et enfin, d’une croissance économique plus «saine», plus islamique, mais non point moins forte.
Gloire et louange à Dieu l’Omniscient.

I. Omarjee
Courtoisie “Espace de l’Islam”